Aller au contenu

Page:Rosny aîné - Le Cœur tendre et cruel, 1924.djvu/78

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ture et ne savent que se dire. Car la parole, après les civilisations superposées, est devenue un rite fatal, sans quoi nos sentiments ne peuvent se joindre, et le silence semble pire que le néant : c’est un tombeau.

Jusqu’à Billancourt, Marie s’effraya d’être, à côté de son compagnon, comme si elle en était séparée par un étroit mais profond précipice. Parce qu’elle ne tenait aucun compte de l’expérience, elle attendait, dès le début, quelque douceur semblable à celle de l’acrostiche. Peut-être avait-elle rêvé que Georges apporterait d’autres vers pour elle et les lui réciterait, à la proue du bateau, dans le souffle clair de la brise. À le voir glacé de mutisme, elle eut froid elle-même et fut prise d’aphasie Les peupliers la dégelèrent. Il y en avait une douzaine, hautes créatures frissonnantes, qui secouaient une