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Page:Rosny aîné - Nymphée - Le Lion, 1909.djvu/74

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étaient en nombre, d’un phénomène étrange et délicieux. L’eau, rythmée par leur ballet, élevait peu à peu une voix euphonique. Cette voix, partie d’une mélopée indicible, une confidence de murmures, un chuchotement d’harmonies s’enflait lentement, ineffablement. L’Élément tremblait et chantait, l’élément envoyait un grand hymne humide — ô douceur intraduisible, ô voix pénétrante du prodige ! — qui nous faisait venir des larmes d’exaltation.

Encore, je rêvais à la Légende, à cette victorieuse voix des Sirènes que les navigateurs antiques crurent ouïr sur les flots. N’était-ce pas elle que nous entendions dans la nuit argentée, mais si bonne, si fraternelle ! Et combien supérieure au mythe, car c’est l’Eau même, c’est le Lac qui chante, — c’est la grande rumeur des vagues soumise au rythme par les Hommes-des-Eaux — comme y pourrait être soumise la rumeur du Vent sur les Forêts.