Page:Rosny aîné - Nymphée - Le Lion, 1909.djvu/95

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devinai qu’il s’agissait d’un départ : l’espérance glissa furtive sur mon âme.

Le ciel était pur sur les trois quarts de son pourtour, particulièrement à l’orient. Une lueur jaune errait sur les eaux. Les bêtes amphibies bruissaient sur les feuilles de nénuphar, sur les longs glaives de l’iris. Toute l’humide perspective exhalait une poésie nerveuse. On percevait la fécondité sans bornes, le tendre élan de joie frôlant la pointe des roseaux, l’aile des noctuelles et des chauves-souris, la rêverie des saules. C’était un des jours où la création psalmodie la renaissance éternelle.

Les Hommes-des-Eaux le sentirent ; — leurs adieux furent une fête miraculeuse. Jamais je ne vis, sur le petit cosmos lacustre, un plus adorable ballet, une plus harmonieuse rêverie mouvante. Corps noirs et corps clairs passaient en entrelacs infinis, en arabesques pleines d’un sentiment subtil des courbes, en symphonie de trajectoire.