Page:Rostand - Chantecler.djvu/249

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CHANTECLER, d’une voix étouffée.

Oui…

LA FAISANE, le berçant toujours et regardant de temps en temps
derrière elle, d’un rapide mouvement de tête, où en est la lumière.

Oui… …Qu’une aile est un cœur déployé…

À part.

Oui… …Qu’une aile est un cœur déployé… L’Aube vient !

À Chantecler.

Tu vois bien…

À part.

Tu vois bien… L’air pâlit.

À Chantecler.

Tu vois bien… L’air pâlit. …Qu’elle est…

À part.

Tu vois bien… L’air pâlit. …Qu’elle est… Tout l’arbre est rose !

À Chantecler.

… Un bouclier qui berce, un manteau qui repose,
Un baiser qui finit par devenir un toit…
Tu vois bien…

Elle bondit en arrière, et écartant brusquement ses ailes :

Tu vois bien… que le jour peut se lever sans toi !

CHANTECLER, avec le plus grand cri de douleur
que puisse pousser un être.

Ah !

LA FAISANE, continuant implacablement.

Ah ! …que les mousses vont bientôt être écarlates !

CHANTECLER, courant aux mousses.

Ah ! non, non ! attendez ! pas sans moi !…

Les mousses s’empourprent.

Ah ! non, non ! attendez ! pas sans moi !… Les ingrates !

LA FAISANE.

L’horizon…

CHANTECLER, suppliant, à l’horizon.

L’horizon… Non !…

LA FAISANE.

L’horizon… Non !… …Se dore !

Tout le fond se dore en effet.
CHANTECLER, chancelant.

L’horizon… Non !… …Se dore ! Ah ! quelle trahison !