Page:Rostand - Chantecler.djvu/250

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LA FAISANE.

On est tout pour un cœur, rien pour un horizon !

CHANTECLER, défaillant.

Ah ! c’est vrai…

PATOU, qui rentre, joyeux et cordial.

Ah ! c’est vrai… Me voilà, c’est moi, je viens te dire
Qu’ils veulent tous ravoir, dans la ferme en délire,
Le Coq qui fait le jour du haut de son talus.

CHANTECLER.

Ils le croient maintenant que je ne le crois plus !

PATOU, s’arrêtant, saisi.

Comment ?

LA FAISANE, se serrant âprement contre Chantecler.

Comment ? Tu vois qu’un cœur qui contre vous se serre
Vaut mieux qu’un ciel auquel on n’est pas nécessaire !

CHANTECLER.

Oui !…

LA FAISANE.

Oui !… Que l’ombre, après tout, vaut bien le jour lorsqu’au
Fond de l’ombre on est deux !

CHANTECLER, égaré.

Fond de l’ombre on est deux ! Oui… oui…

Mais, tout d’un coup, il s’écarte d’elle, se redresse et d’une voix éclatante :

Fond de l’ombre on est deux ! Oui… oui… Cocorico !

LA FAISANE, interdite.

Pourquoi chantes-tu donc !

CHANTECLER.

Pourquoi chantes-tu donc ! Pour m’avertir moi-même,
Puisque j’ai par trois fois renié ce que j’aime !

LA FAISANE.

Et quoi donc ?

CHANTECLER.

Et quoi donc ? Mon métier !

À Patou.

Et quoi donc ? Mon métier ! Reprenons le sentier !