Page:Rostand - Cyrano de Bergerac.djvu/197

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Son pauvre nez a pris des tons de vieil ivoire.
Il n’a plus qu’un petit habit de serge noire.

Le duc.

Ah ! celui-là n’est pas parvenu ! — C’est égal,
Ne le plaignez pas trop.

Le bret, avec un sourire amer.

Ne le plaignez pas trop.Monsieur le maréchal !…

Le duc.

Ne le plaignez pas trop : il a vécu sans pactes,
Libre dans sa pensée autant que dans ses actes.

Le bret, de même.

Monsieur le duc !…

Le duc, hautainement.

Monsieur le duc !…Je sais, oui : j’ai tout ; il n’a rien…
Mais je lui serrerais bien volontiers la main.

(Saluant Roxane.)

Adieu.

Roxane.

Adieu.Je vous conduis.

(Le duc salue Le Bret et se dirige avec Roxane vers le perron.)

Le duc, s’arrêtant, tandis qu’elle monte.

Adieu.Je vous conduis.Oui, parfois, je l’envie.
— Voyez-vous, lorsqu’on a trop réussi sa vie,
On sent, — n’ayant rien fait, mon Dieu, de vraiment mal ! —
Mille petits dégoûts de soi, dont le total
Ne fait pas un remords, mais une gêne obscure ;
Et les manteaux de duc traînent dans leur fourrure,
Pendant que des grandeurs on monte les degrés,
Un bruit d’illusions sèches et de regrets,
Comme, quand vous montez lentement vers ces portes,
Votre robe de deuil traîne des feuilles mortes.