Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome I, 1779.djvu/231

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Notre sort est plus doux. En de libres campagnes,
L’amour voit folâtrer nos riantes compagnes.
Nos marais desséchés, nos fleuves contenus,
Nos vaisseaux enrichis aux bords les moins connus,
Mille fruits transplantés sur nos rives fécondes,
Tout nous donne à la fois les trésors des deux mondes.
Eh ! Qu’envîroit la France aux climats étrangers ?
Elle en a tous les biens et non pas les dangers.
L’homme errant n’y craint point ces races écumantes
Des dragons, croupissans au sein des eaux dormantes ;
L’impitoyable tigre, aigri d’un fiel rongeur,
Ne s’enyvre jamais du sang du voyageur :
Mais le cerf innocent, la chèvre pétulante,
Et le coursier docile et la brebis bêlante,
Sous les bois, sur les près, dans les plaines épars,
Pour charmer son ennui s’offrent de toutes parts.
Il voit du bord des eaux, au sommet des collines,
Des châteaux, dominans les campagnes voisines ;
Des murs, d’où tonne au loin le bronze protecteur ;
Des temples, qui des cieux atteignent la hauteur ;
Par des routes d’ombrage à grands frais couronnées,