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Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome I, 1779.djvu/241

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Ainsi vivent heureux les bergers dans nos champs.
Sans doute ils ont perdu de ces plaisirs touchans,
Qui des premiers pasteurs embellissoient la vie.
Ils ne sont plus les jours de l’aimable Arcadie ;
Ces jours, qui sous des cieux fermés aux aquilons,
De la fraiche Aréthuse enchantoient les vallons ;
Qui voyoient l’Eurotas, égaré dans sa course,
De lui-même amoureux, fuir à regret sa source :
L’âge a changé des bords autrefois si charmans.
Là, d’innocens bergers, de fidèles amans
En vers mélodieux soupiroient leur tendresse,
Se disputoient le coeur d’une jeune maîtresse,
La choisissoient pour juge, et par des chants nouveaux,
Savoient la conquérir sur d’aimables rivaux.
Alors les fils des rois, parés d’une houlette,
Des riantes forêts habitoient la retraite.
Le beau pâris enfla les chalumeaux légers ;
Les dieux même, les dieux se mêloient aux bergers.
Apollon vers l’Amphrise, et Pan sur le Ménale,
Comme eux, firent parler la flûtte pastorale :
Les fleuves arrêtés écoutoient ; et l’Hémus
Balançoit les rameaux de ses chênes émus.