Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome I, 1779.djvu/355

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Et du chien tant de fois les lièvres triomphans,
Surpris dans le sillon que leur nombre ravage,
Reçoivent de nos mains la mort ou l’esclavage.
Cependant les épis, au soleil étalés,
Sont par de noeuds de saule en javelle assemblés.
Riche, voici le jour qu’attendoit l’indigence !
Oserois-tu blâmer l’heureuse négligence,
Qui fait tomber des mains du peuple moissonneur
Les épis, destinés à nourrir le glaneur ?
Il est pauvre ; il a droit aux trésors de tes plaines.
Quoi ! De monceaux de blé tes granges seront pleines !
Du sol de vingt hameaux que ton faste a détruits,
Toi seul, vil parvenu, tu dévores les fruits !
Et quand ce malheureux, qu’afflige et désespère
Le nom jadis si cher et d’époux et de père,
Vient, timide glaneur, dans ton champ moissonné
Recueillir de tes grains le reste abandonné,
De ce reste par toi sa misère est frustrée ?
Ah ! Dans ce même champ dont tu fermes l’entrée,
Vois ces flots de fourmis ardens à conquérir