Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome I, 1779.djvu/359

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Le sang des végétaux, qui sous la canicule
De leur tête à leurs piés trop rapide circule.
Depuis trente soleils oublioit de nourrir
L’arbre, que le bélier avoit vu refleurir.
La feuille jaunissante, et de soif épuisée
Vainement, dans la nuit, s’abreuvoit de rosée,
L’aube vers l’orient à peine renaissoit,
Que plus aride encor la feuille languissoit.
Mais aujourd’hui qu’enfin la chaleur amortie
Laisse couler en paix la sève rallentie,
De ce suc nourricier pénétré lentement,
L’arbre de ses rameaux rajeunit l’ornement.
Le sauvage arbouzier pompeusement étale
Sur ses bras reverdis la pourpre orientale ;
L’ananas épaissit son feuillage étranger ;
Un parfum plus suave embaume l’oranger ;
Du rosier épineux la tige printanière
S’ouvre, et laisse échapper sa feuille prisonnière ;
La pelouse renaît et borde le ruisseau ;
Des guirlandes de fleurs courent sur l’arbrisseau,
Qu’envoya sur nos bords la froide Sybérie ;
L’albâtre a couronné le jasmin d’Ibérie,