Aller au contenu

Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome I, 1779.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Jamais ces animaux dans le sang élevés
Du lait de la brebis ne furent abreuvés ;
Ils ne furent jamais revêtus de sa laine.
Le boeuf pour les nourrir féconde-t-il la plaine ?
C’est pour toi que sans fiel, docile à l’aiguillon,
Il creuse sous le joug un pénible sillon ;
Sa constance aux travaux rend tes guérets fertiles :
Et la mort est le prix de ses travaux utiles !
Et tu verses son sang ! Et tu manges sa chair !
Tu t’es donc fait, ingrat, des entrailles de fer ?
Je méconnois en toi l’auguste créature,
Que d’un limon plus doux façonna la nature,
Qu’elle forma sensible à la voix des douleurs ;
À qui seule, elle apprit à répandre des pleurs.
Tu dégrades ton nom ; et cruel à toi même,
Tu hâtes la lenteur de ton heure suprême.
Corrupteur de ton sang, le sang des animaux
Y dépose, y nourrit le germe de tes maux,
De la fièvre en ton sein fait bouillonner la flamme,
Et porte le délire au siége de ton ame.
Maudit soit le mortel, qui du fruit des buissons