Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/24

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Devront cette énergie et ces accords touchans,
Qui, maîtrisant le coeur par l’oreille enchantée,
Font aimer dans mes vers la nature imitée.
D’un rocher sourcilleux atteignant la hauteur,
C’est-là que je voudrois, poëte observateur,
De l’immense univers embrasser la structure ;
Et dans ses profondeurs poursuivant la nature,
Percer de mes regards sagement indiscrets,
La nuit majestueuse où dorment ses secrets.
Mais à me condamner sans doute déjà prête,
Une fausse vertu va me crier : « Arrête.
Arrête, téméraire ; et bornant ton orgueil,
Sur l’ouvrage des dieux ne fixe point ton oeil :
Pour jouir seulement, ces dieux te firent naître. »
Taisez-vous, imposteurs ! L’homme est fait pour connoitre.
Et sans ce noble instinct de curiosité,
Dont un vaste génie est sans cesse agité ;
Dites, que serions-nous ? Une horde sauvage,
Que la faim chasseroit de rivage en rivage,
De tristes voyageurs, dont le bras tout sanglant
À l’hôte des forêts disputeroit le gland.