Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/273

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


L’hyver, qui chagrinoit votre orgueil révolté,
Désormais vous épargne ; et la flamme éthérée,
Abrégeant de la nuit la trop longue durée,
Sur vous laisse reluire un ciel toujours serein.
L’aquilon, dans les flancs d’un profond souterrein,
S’assoupit ; le zéphyr souffle seul et murmure ;
Il conserve aux forêts leur épaisse ramure,
Et sans cesse les fleurs émaillent le gazon :
Vous êtes satisfaits ? Mais la verte saison
N’amène, ni le tems propice à la semence,
Ni les jours nourriciers, où la moisson commence.
Bien loin de rajeunir, la terre tous les ans
S’épuise, et par degrés amoindrit ses présens.
Elle demande en vain ces vapeurs et ces ondes,
Qui jadis ranimoient ses entrailles fecondes.
Hélas ! Trop tempéré, le pur flambeau du jour
Ne peut les enlever au liquide séjour.
Les fleuves, tristement renversés sur leurs urnes,
Dans leurs lits desséchés expirent taciturnes !
Leurs bords, mourans de soif, ne sont plus abreuvés :
Le commerce languit, et ses bras énervés
Dorment, silencieux, sur la rame inutile.