Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/340

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Malgré moi j’ai suivi ce sombre moraliste,
Ce chantre de la nuit, qui, grossissant la liste
Des poisons, quelquefois mêlés parmi les fleurs,
Se refuse aux plaisirs, et n’a de goût qu’aux pleurs,
Tais-toi, farouche Young ; ta sublime folie
Remplit d’un fiel amer la coupe de la vie.
Eh ! Qu’apprend aux humains ta lamentable voix ?
Que de la mort un jour il faut subir les loix ?
Mais cette vérité, sans toi, tout me l’enseigne :
Tout me dit que la mort rallie à son enseigne
La foule des humains, à la vie arrachés.
N’ai-je pas vu les rois dans la poudre couchés ?
Qui ne fait pas leur gloire au tombeau descendue,
Et de mille cités la splendeur confondue !
Babylone, Ecbatane, Ilion est détruit ;
Et l’orient désert n’en garde que le bruit.
Mais ce qu’on cèle à l’homme et ce qu’il doit connoître,
C’est qu’il faut se résoudre à voir finir son être,
Sans chercher, dans la nuit d’un douteux avenir,
Un glaive impitoyable affamé de punir ;
Sans refuser son coeur à la douce allégresse,