Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/90

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Ah ! Du moins en faveur de nos humbles chaumières,
Rappelle, dieu clément, tes bontés coutumières !
Par cet autel sacré, d’où l’encens autrefois
Vers ton trône éternel montoit avec nos voix,
Par les pleurs, dont souvent j’ai baigné tes portiques,
Par mes cheveux blanchis dans les travaux rustiques,
Laisse, laisse ma race au nombre des vivans ;
Cache-la dans ton temple au souffle impur des vents ;
Ou s’il doit pénétrer ton auguste demeure,
Le premier de ma race, ordonne que je meure. »
Il dit. Sous l’épaisseur d’un voile ensanglanté,
Neuf fois l’astre du jour obscurcit sa clarté,
Et neuf fois de la nuit les ombres lui succèdent :
Lorsqu’enfin succombant aux terreurs qui l’obsèdent,
Philamandre s’endort. De la faveur des cieux
Un songe le berçoit. Songe fallacieux !
Tout-à-coup un long cri l’éveille. Aux lueurs sombres,
Qu’une lampe mourante épanche dans les ombres,
Il découvre Linda, qui l’oeil fixe, égaré
Se traîne, et va tomber sur le marbre sacré.
Il court avec Sainmaurt, il pleure ; et sa tendresse,