Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/92

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Achève, prends la mienne. ô Sainmaurt, attends-moi !
Je demandois au ciel de mourir avant toi ;
Et c’est moi, malheureux, qui vois ta dernière heure !
Mes enfans ne sont plus ; je les perds... que je meure ! »
Attaché sur son fils, il pleuroit ; et la mort
Dans les bras paternels avoit frappé Sainmaurt.
Déjà d’un feu rongeur atteint jusqu’aux viscères,
Lui-même, il est couvert de livides ulcères.
Il se relève, il tombe, il meurt en gémissant,
Le dernier de sa race et d’un peuple innocent.
Tous les ans, il est vrai, l’automne moins funeste
Ne souffle point sur nous les horreurs de la peste ;
Mais toujours, de brouillards resserrant l’horizon,
Il change la campagne en humide prison ;
Jaloux du roi brillant qui verse la lumière,
Dépouille ses rayons de leur chaleur première,
Du sang et des humeurs trouble en nous les accords,
Énerve notre force allume dans nos corps
Les ardeurs de la fièvre à la soif dévorante,
Et livre au noir ciseau notre vie expirante,
Aussi le dieu du mal ; jadis à ses autels,