Page:Rouleau - Légendes canadiennes tome I, 1930.djvu/52

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« J’arrive au plateau sur lequel brûlait le grand feu. Je ne découvre rien. Le plateau est dans le même état qu’auparavant. J’allais continuer mon chemin vers mon gabion, lorsque je foule du pied une tuque toute neuve, bonnet de laine qui était fort en usage à cette époque. Je ramasse le bonnet et je le fourre dans mon sac. Je vais ensuite me reposer dans ma cabane.

« Le lendemain matin, au petit jour, j’abats un nombre considérable de canards et d’outardes, et je reviens à la maison faire bombance avec ma femme et mes enfants, à qui je raconte l’aventure qui m’était arrivée pendant la nuit, sans oublier de mentionner ma trouvaille.

« Le dimanche suivant, je me flanque mon bonnet neuf sur le côté de la tête et je m’en vais à l’église. C’était la mode des bonnets en ce temps-là. La première personne que je rencontre à la porte de l’église, c’est Pierre à Michel, que je vous ai nommé au commencement de ce récit. En m’apercevant, il s’écrie :

« — Tiens, tu as mon bonnet ! Où l’as-tu donc pris ? »

« Je lui rappelle ce qui était arrivé l’autre nuit au Cap-au-Diable.

« Pierre me dit aussitôt ;

« — Tu m’as rendu un service signalé. J’étais amorphosé, tu m’as délivré. Mais je te demande une chose. Jure-moi que tu ne dévoileras jamais ce secret tant que je serai vivant. »