Page:Rouleau - Légendes canadiennes tome II, 1930.djvu/97

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cère. J’ai assez péché et assez fumé, — ce soir, je n’ai pas oublié mon batte-feu, — et je vais te raconter immédiatement l’histoire que je t’ai promise ; car, encore une fois, parole donnée, parole sacrée. »

Le père Jean Godin commença son récit sans autre préambule :

« La légende du moulin le met sans doute sous l’impression que je puis être classé parmi nos hommes forts. C’est peut-être vrai jusqu’à un certain point, car je charge facilement sur mon épaule droite un quart de lard de trois cents livres ; mais, mon cher petit, je ne suis qu’un nain auprès de mon grand-père Jean Godin et de son ami Pierre Léveillé : le premier, sergent, et le second, caporal dans le détachement de troupes françaises en garnison au fort Jacques-Cartier en 1759. Écoute un épisode de leur vie. J’abrégerai mon histoire autant que possible, afin de retourner au logis avant la noirceur.

« Après la défaite de Montcalm sur les Plaines d’Abraham, le 13 septembre 1759, la vaillante petite armée française se retira à la rivière Jacques-Cartier, où le chevalier de Lévis vint en prendre le commandement le 17 septembre. Deux jours après, c’est-à-dire le 19, le chevalier de Lévis, voulant empêcher la ville de Québec de tomber au pouvoir de l’ennemi, arriva avec son armée à Saint-Augustin ; mais là il eut la douleur d’apprendre que M. de Ramezay avait capitulé la veille. L’armée française se replia, une seconde fois, sur la rivière Jacques-Cartier. En opé-