Page:Rouquette - La Nouvelle Atala, 1879.djvu/25

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monde n’était pas fait pour elle. Son âme contemplative se tournait instinctivement vers la Solitude, comme l’héliotrope vers le soleil, l’aiguille aimantée vers le Nord, la flamme vers son foyer céleste. Sensitive délicate, organisation impressionnable, le contact du monde l’eût bientôt froissée, son souffle l’eût flétrie et fait pencher vers la terre. Dieu voulut la mettre à l’abri, en la transportant dans le désert. Cette Fleur virginale ne pouvait prospérer et s’épanouir que dans la solitude, où tombe la rosée du ciel sans avoir traversé l’atmosphère impure qui enveloppe les cités populeuses. En elle, le sentiment de la poésie était aussi exalté que le sentiment de la musique et de la peinture. Elle apercevait d’une manière merveilleuse les relations intimes qui existent entre les différentes formes du beau, dont reluit et resplendit l’univers visible, qui n’est qu’une harmonieuse manifestation de l’invisible Idéal. Elle s’élevait de degré en degré, montait de clarté en clarté, en s’efforçant d’atteindre la Splendeur Incréée d’où rayonnent toutes les autres splendeurs, depuis celle de l’étoile jusqu’à celle du lys ; elle s’abîmait avec extase dans l’Océan Infini de l’Amour Essentiel : C’est alors qu’elle se transfigurait et semblait toute rejaillissante de lumière et de flammes mystiques… O chaste et douce Atala, austère et naïve enfant de la prière, vierge du sanctuaire, qu’aurais-tu fait au milieu du bruit et du tumulte