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Page:Rouquette - La Nouvelle Atala, 1879.djvu/65

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d’une passion partagée, et va bientôt subir toutes les pénibles servitudes qu’entraîne l’indissoluble engagement qu’elle a pris d’appartenir à un autre,—elle qui aimait tant la liberté…O femme ! est-ce faiblesse, est-ce compassion de ta part ; ou bien est-ce dévouement, est-ce héroïsme ?

Fleur-du-Soir, ou Lossima, la sœur d’Issabé, continuait toujours d’habiter sa cabane, bâtie sur le bord du lac Okatta. Elle aimait à être seule, à se parler à elle-même, à parler aux fleurs, aux oiseaux et aux étoiles : Mais cependant, elle venait souvent visiter Atala. Si elle avait été instruite comme elle, dans une école des Pâles-Visages, elle aurait lu de préférence et avec enthousiasme les poèmes d’Ossian, les Nuits de Young, les Méditations de Lamartine, les Prophètes et Job. Son esprit était élevé, son cœur profond. Dans son regard scrutateur il y avait quelque chose de sévère. Le coin de sa bouche était marqué d’un pli moqueur. Son sourire avait la froideur de la raison, mais de la raison la plus haute, de cette raison qui est voisine de l’inspiration intuitive. On était tenté, en la voyant, de la prendre pour une astrologue, au regard fatidique, qui s’entretient la nuit avec un génie familier, dans le mystère et le silence de la solitude. Et cependant, malgré toutes ces apparences extérieures, elle était au fond la créature la plus ingénue et la plus mélancolique du désert : Les animaux sauvages s’approchaient