« rer, à bénir et à adorer sans cesse l’auteur de ce don précieux dans ce don lui-même… autre idée incompréhensible, et qui doit l’être, pour tout ce qui ne croit plus à la présence réelle.
« L’idée que dans ce déluge de crimes, d’impiétés et de blasphèmes qui inondent la terre, la miséricorde de Dieu puisse être implorée, et son courroux désarmé par les prières et les sacrifices de quelques âmes fidèles et ferventes sans cesse prosternées pour demander grâce et pour détourner les fléaux de la tête des coupables — cette idée (que réveillent plus que jamais des temps comme les nôtres) est une troisième idée incomprise et rejetée de ceux qui ont rejeté toute croyance à la puissance de l’intercession.
« Et à ceux qui nient la valeur des actes de souffrance et de mortification volontaire, à ceux qui disent : « Pourquoi souffrir ? il n’y a pas de plus haute vertu que de jouir raisonnablement des biens de la vie ? » Comment faire comprendre cette réponse de quelques âmes (qui est une quatrième idée de la vie contemplative) ? « Parce que Celui qui nous a aimés plus qu’aucune créature ne nous aimera jamais, a voulu souffrir et mourir pour nous, et qu’en retour nous voulons l’aimer uniquement et souffrir pour Lui et avec Lui pour nos frères.
« Enfin le souvenir de Madeleine, — premier modèle de contemplation et d’amour parfait ! — Madeleine, immobile aux pieds du Sauveur, fut protégée par Lui contre le saint empressement de sa sœur par ces douces paroles : Marie a choisi la meilleure part ; et l’Église, attentive aux moindres paroles de son Maître, tout en secondant et bénissant la vie active et dans le monde et dans le cloître, garde une place pour un petit nombre de ses enfants que le même amour retient, comme Madeleine, aux pieds de Jésus-Christ et nous dit comme Lui : Laissez-les, elles ont choisi la meilleure part !
« Voilà en quelques mots bien faibles et incomplets pourquoi nous respectons la haute et rare vocation des âmes contemplatives, et pourquoi il nous est impossible d’espérer que personne hors de l’Église partage ce respect. Mais en même temps il nous semble que dans cet exposé, s’il n’y a rien qui ait pour ceux-là une utilité visible, il n’y a rien non plus qui doive leur inspirer un sentiment plus hostile que l’oubli — et c’est tout ce que nous réclamons d’eux. Oubliez-les, ces âmes, laissez-les dans leur repos et leur silence, et ne pensez pas à elles, même pour les plaindre, car il se pourrait que votre pitié tombât sur les créatures de ce monde les plus dignes d’envie.
« Ceci, sans doute, paraîtra une exagération ou une énigme ; et nous-mêmes, qui avons le cœur et l’esprit remplis de toutes les affections et de toutes les pensées de la terre, et qui y sommes enchaînées par mille liens que nous ne songeons pas à rompre, nous nous étonnons souvent de cette inconcevable félicité des âmes séparées de tout ; mais nous y croyons, et en voyant ce que peut pour le bonheur le seul amour de Dieu, même en ce monde, nous avons senti nos désirs se détacher un peu des choses visibles et s’élever vers les invisibles, qui sont, en définitive, la vraie destination de tous. Et ce n’est pas la moindre des leçons qu’on reçoit à travers ces grilles, dont on approche souvent avec effroi, mais qu’il arrive parfois de quitter avec la pensée que l’esclavage et la douleur sont du côté où nous nous trouvons, et que nous laissons de l’autre la liberté et le bonheur.
« Or, le bonheur n’est pas, dans ce monde, chose si commune à posséder ou si facile à donner aux autres, qu’on ait le droit de le disputer à ceux qui le trouvent sans nuire à personne ; il est donc bon que tout le monde sache que du fond de ce qu’on a appelé des prisons, il s’élève des chants de triomphe et d’allégresse tels qu’aucun lieu de la terre n’en entend de semblables. Cela est étrange, peut-être, — mais cela est ainsi ; — et, chose plus surprenante encore, pour le monde qui croit au moins avoir le monopole de l’esprit, et qui regarde comme insensés ceux qui vivent absolument hors de lui et sans lui, c’est qu’il est sorti de ces retraites des écrits merveilleux, qui ont manifesté à tous que l’intelligence s’y développe et s’y élève autant que l’âme. La seule différence entre ceux qui cultivent ces dons au milieu du monde et ceux qui les possèdent dans le cloître, c’est que l’humilité (sans laquelle il n’existe aucune vertu religieuse) est inséparable de ceux-ci, et s’y trouve aussi intimement unie au génie de Sainte Thérèse qu’aux œuvres héroïques d’une Sœur de la Charité.
« Et maintenant, sans discuter davantage ces faits ou ce qui les produit, reconnaissons du moins avec un écrivain du dix-septième siècle (bien versé lui-même dans les profonds mystères de la vie contemplative), « qu’il n’appartient