Page:Rouquette - La Thébaïde en Amérique, 1852.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hommes, mais elle est aussi un écoulement de la vie des Anges. »

« La virginité, dit Saint-Jérôme, soutient toutes les vertus, elle les embellit et les protège. Et Saint-Cyprien : la virginité est l’ornement des mœurs, la gloire de l’un et de l’autre sexe ; vénérable à ses ennemis, irréprochable à leurs yeux, lors même qu’ils l’outragent, ils ne peuvent l’accuser ; c’est elle qui les force à rougir, et à se condamner eux-mêmes. »

La virginité rend l’esprit plus libre et plus propre à s’appliquer aux choses célestes, à contempler Dieu, à goûter la vérité ; elle affranchit le cœur des affections de la créature, de ces affections toujours si pleines de trouble et d’amertume, et qui sont plutôt des supplices que des satisfactions ; elle conserve au corps la santé, la jeunesse et la beauté ; et quand nous disons la santé, nous n’entendons pas des formes athlétiques, une force physique de géant, mais nous entendons l’intégrité, la vitalité accumulée, l’exaltable et exquise sensibilité d’une chair angélisée, caro angelificata, selon l’énergique expression de Tertullien.

Mais ce n’est pas par un effort ordinaire que l’on arrive à surmonter la nature corrompue, à soumettre la chair rebelle, et à s’élever à la condition des Anges, à la dignité des Esprits célestes ! Aussi, Jésus-Christ nous dit-il : « Tous ne sont capables de cette résolution, mais ceux-là seulement à qui il a été donné d’en haut. » Non, la masse n’est pas disposée à accomplir le conseil de la perfection évangélique ; elle observe tout au plus le précepte obligatoire, et encore elle l’observe très mal. — C’est le sort de tout ce qui n’est pas vulgaire de paraître extravagant aux yeux du vulgaire : une résolution généreuse, héroïque n’est jamais suivie par la masse ; elle va son TRAIN ORDINAIRE ; elle s’inquiète peu ou se défie des sublimes exceptions. Aussi, on peut lui dire aujourd’hui, en parlant de la chasteté, et surtout de la chasteté virginale, ce que Jésus-Christ disait autrefois : « Comprenne, qui pourra comprendre ! »

Qu’est-ce donc que la chasteté ? — C’est une fille du ciel, un ange de la terre, une sœur de la sagesse ; et elle peut dire comme sa sœur : « j’ai poussé des fleurs d’une agréable odeur, et mes fleurs sont des fruits d’abondance. Je suis la mire du pur amour, de la crainte, de la science et de l’espérance sainte. Venez à moi, vous tous qui me désirez : mon esprit est plus doux que le miel ! » (Eccl. 24.) C’est en parlant de la beauté de la chasteté que le Psalmiste s’écrie : Écoutez, vierges ; ouvrez les yeux et prêtez l’oreille : le Roi est épris de votre beauté ! (Ps. 44.)

À chaque page de l’Écriture Sainte, nous lisons l’éloge de la pureté, de la chasteté : « l’incorruption, nous dit-elle, nous fait approcher de Dieu. — Celui qui aime la pureté du cœur aura le Roi pour ami. — Heureux les cœurs purs ; car ils verront Dieu. — Ceux qui ne sont pas purs n’entreront pas dans le royaume des cieux. — Les vierges dans le ciel suivent l’Agneau sans tache partout où il va, et chantent à sa gloire un cantique nouveau. — Oh ! quelle est belle et rayonnante de gloire la génération des hommes chastes ! »

Les Saints Pères ont épuisé toutes les richesses de l’éloquence et de la poésie pour louer la chasteté, pour la faire connaître et aimer des hommes et des femmes, afin qu’ils devinssent des anges ! — Mais, ô vertu divine, ô fille du ciel, tu surpasses toute éloquence, toute poésie humaine ! Qui pourrait te concevoir, te comprendre, t’admirer et