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LE GRAND SILENCE BLANC

Il avait une force de résistance étonnante. Il lavait parfois dix-huit tonnes de sable dans une journée !

L’eau qui coulait dans le sluice-box semblait soutenir son courage. Parfois il s’arrêtait et s’amusait à plonger sa main dans l’eau qui coulait, sans arrêt, entre ses doigts, rapide et insaisissable.

J’avais dit : « Avant trois mois, en voilà un qui aura replié bagage et qui prendra le chemin de Dawson sans espoir de retour. »

Les mois passèrent. L’homme tint. Je partis. Après une longue tournée, je le retrouvai, toujours ardent à la besogne, œuvrant comme un mercenaire. Avec cela sérieux comme un ministre, jamais au cabaret, jamais une bonne goulée de whisky qui assomme, jamais une carte entre les doigts.

Il avait pris goût au métier. La joie qu’il avait en lavant sa « paye », il la retrouvait en regardant ses appareils d’amalgamation qui tournaient en cadence ; il surveillait avec amour son rocker, suspendu comme un berceau d’enfant, recouvert d’une toile grillagée avec, au fond, un tapis de toile grossière.

Le sable aurifère déposé sur la grille, sous la double influence de la rotation et de l’eau, cédait ses parties les moins grossières qui se tamisaient, peu à peu, pour ne laisser — l’or étant dix-huit