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Page:Rouquette - Le Grand Silence Blanc, 1920.djvu/189

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LE GRAND SILENCE BLANC

chimistes ! De l’or ! La possibilité de satisfaire son désir ! De l’or ! Le prestige, la puissance, de… Quelles fâcheuses bêtes que les hommes !

Celui dont je parle, véritablement, découvrait le monde, il avait des innocences d’enfant. Il fallait voir sa joie lorsqu’au fond de la pan où il lavait les sables, il vit, pour la première fois, des petits grains luisants… Il fut tellement satisfait qu’il pleura.

Il resta des heures à contempler sa « paye », les yeux fixes, les mains trembleuses ; on aurait dit qu’il voyait quelque chose, comme dans un miroir.

Je lui ai aidé à construire son premier sluice-box, son premier canal incliné, long d’une centaine de pieds.

Je lui expliquai pourquoi il fallait garnir le fond de saillies en bois et de cavités et pourquoi dans les cavités on mettait du mercure.

Il ignorait, le cher garçon, que l’or a la propriété de s’unir au mercure et qu’ainsi il est plus facile de le débarrasser du sable granulaire.

Du courage ? Il en avait, malgré son air chétif, et jetait vaillamment dans le haut de « la boite » la matière.

Il maniait la pelle avec ardeur. Parfois il s’arrêtait. Je surprenais alors la même fixité dans ses yeux. Il semblait toujours regarder plus loin, dans la vie… Il soupirait, crachait dans ses mains et reprenait l’outil.