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LE GRAND SILENCE BLANC



— L’arrière-boutique d’un bar, à Seattle, dans l’État de Washington, où malgré les prohibitions, on boit toute la gamme des alcools, depuis le gin d’Écosse jusqu’à la grappa d’Italie, en passant par le cognac de France. La salle est pleine de joyeux garçons, marins arrivant des mers du Pacifique, caboteurs venus d’Europe et remontant jusqu’à Vancouver, après avoir suivi la côte, passé le détroit de Magellan.

On parle toutes les langues ou plutôt l’argot de toutes les langues. Le slang domine, depuis les appellations gutturales des Chiliens au teint olivâtre, jusqu’au zézaiement des Chinois, aux yeux bridés, aux visages ridés comme des pattes de poule.

Les Malais mâchent du bétel, les Yankees de la gomme. Deux marins, basque et marseillais, fument la cigarette, le premier silencieux et grave, le second par bouffées saccadées et hâtives.

Il y a des matelots de la marine fédérale, pantalons à pattes d’éléphant et béret en galette.

Tous ont le cou libre, nerveux, musclé, avec une ligne de peau plus mate lorsque le cou se soulève.

Des mineurs descendus du Klondyke jouent