Aller au contenu

Page:Rouquette - Le Grand Silence Blanc, 1920.djvu/233

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
233
LE GRAND SILENCE BLANC

Et pour donner plus de vraisemblance encore à ce tableau, dans une rupture d’équilibre, avec ce don inouï du contraste, qui fait le génie de Berlioz, Sandrino interprétait maintenant le Chœur des Anges, où tout le mysticisme de la foi est enclos.

Tous ces hommes, toutes ces femmes avaient oublié Dieu depuis de longs jours déjà.

Cette damnation était à leur image, cette course à l’abîme était la course chimérique de l’or, gardien de la cité, pourvoyeur de plaisir, donneur de considération, dispensateur de renommée… et la mort passait, emportant la vie en croupe.

Les illettrés et les mécréants comprenaient obscurément cette chose, des larmes délayaient le fard des filles, les hommes avaient un pli rude au front.

La dernière note les délivra de leur angoisse.

La dernière note. L’âme du piano chante encore et vibre dans la prolongation du son. Les mains restent, inertes, sur le clavier.

Ayant accompli sa mission, ayant purifié sa vie, Sandrino courba la tête comme pour accepter son Destin. Puis, il mourut.