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LE GRAND SILENCE BLANC

dant à ce qu’il croit une caresse. Il s’approche et avec son crâne, qu’il a dur et bossué, il me donne des coups à la façon des béliers…

— Il faut vous obéir, soit, mais vraiment vous êtes insupportable.

D’un coup sec, je ferme mon couteau qui claque. Il a compris le signal. Il est fier de s’être fait entendre. Il bondit et jappe, joyeux, la queue en coquille d’escargot… En maugréant contre ma faiblesse, je range mon assiette après l’avoir lavée d’une poignée de neige. Je boucle mon sac.

— En route, puisque vous le voulez. Vous êtes le maître de ma vie, allez devant, je vous suis…

Pendant que j’attelle ses compagnons, Tempest reste à mes côtés, surveillant tous mes gestes ; la dernière courroie serrée, il va de lui-même se placer en tête. À peine son harnais est-il assuré, qu’il lance l’appel du départ et file un train d’enfer.

J’ai juste le temps de sauter sur le taku où je tombe debout, les rênes en main.

Il a le diable dans le corps, il tire de tous ses muscles, excitant les autres chiens de la voix ; ceux-ci, gagnés par cette belle ardeur, donnent toute leur force ; si l’un d’eux paresse ou se ralentit, le chien d’à côté lui mord les pattes.

La vitesse les grise… jamais mon team n’a donné un tel effort. Vainement, j’essaie de mo-