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foulé par sa puissance. Nous ne voyions plus ses rives, et son influence se faisait sentir encore ; la fumée du remorqueur, retournant à la Nouvelle-Orléans, s’élevait au loin vers l’horizon ; un petit nuage de terre rappelait la présence de l’Amérique : elle était là, de moins en moins perceptible, une vapeur, une ligne indécise, un point, plus rien… Mais l’homme a une âme où tout ce qu’il éprouve de sensations, tout ce qu’il amasse de souvenirs, se grave en traits ineffaçables ! Oh ! belle Amérique, terre de liberté, république mère de vingt-six autres républiques, refuge de tous ceux qui souffrent, asile des opprimés, patrie des cœurs mélancoliques, adieu ! Je t’aimais, moi, enfant capricieux, qui cherchais le désert et la paix ! tu as été bonne pour moi ; jamais je n’oublierai tes lacs dont j’écoutais murmurer les flots limpides, tes fleuves sans sources, tes villes dont tu t’enorgueillis, et surtout tes haltes de nuit au bord d’un ruisseau, quand tout dort dans la nature, depuis le colibri au fond d’une fleur, jusqu’à l’Indien sur sa peau d’ours : aujourd’hui tu me donnes encore de doux songes, et j’aime à parler de toi comme d’un ami absent. »


8. Les chênes du Lacombe…

Le Lacombe et le Bonfouca dont il est souvent question dans ce recueil, sont deux petites rivières qui débouchent au lac Pont chartrain. À leur embouchure, sur des grèves arides et sablonneuses, se dessinent au loin de larges bouquets de chênes verts. Ces arbres séculaires voilés de longs festons de mousse blanche, offrent de frais abris