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MIRABEAU.

Il n’y a plus en France, aujourd’hui, ni roi, ni aristocratie, ni veto ; mais il y a toujours des Assemblées, et, fût-ce des assemblées républicaines, elles peuvent faire leur profit de cette prophétique leçon.

Même sagesse, même clairvoyance, lorsque, pressentant les conséquences d’une abdication qui devait être bientôt si funeste, Mirabeau demande vainement que les membres de l’Assemblée constituante puissent être élus aux Assemblées qui viendront après elle.

Et, à quelques jours de là, quand Blin et Lanjuinais proposent que le Roi ne puisse pas prendre ses ministres parmi les membres de la représentation nationale, avec quelle énergie il combat cette motion inconsidérée ! « Je ne puis croire… que la confiance accordée par la nation à un citoyen doive être un titre d’exclusion à la confiance du monarque… Je ne puis croire que l’on veuille faire cette injure au ministère de penser que quiconque en fait partie doit être suspect par cela seul à l’Assemblée. »

Des murmures l’interrompent : ce que plaide là Mirabeau, c’est sa propre cause ! Il veut, tout en restant député, devenir ministre ! Il négocie, dans ce but, avec la cour… Il veut assurer au gouvernement dont, demain, il sera le chef, le profit de sa parole et l’ascendant de son éloquence ! Eh ! qui le nie ? « Mais vaut-il donc mieux que le Roi choisisse ses ministres parmi ses courtisans que parmi les élus du peuples ? » Puis, impatienté de ces vains détours,