Page:Rousseau - Œuvres et correspondance inédites éd. Streckeisen-Moultou.djvu/139

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
cœur que dans la tête : les hommes que leurs passions n’aveuglent pas font toujours bien.
 
Les hommes sont naturellement paresseux ; mais l’ardeur du travail est le premier fruit d’une société bien réglée, et quand un peuple retombe dans la paresse et le découragement, c’est toujours par l’abus de cette même société, qui ne donne plus au travail le prix qu’il en doit attendre.
 

Partout où l’argent règne, celui que le peuple donne pour maintenir sa liberté est toujours l’instrument de son esclavage, et ce qu’il paye aujourd’hui volontairement est employé à le faire payer demain par force.

 
C’est alors qu’il faudra employer l’excédant à l’industrie et aux-arts pour attirer de l’étranger ce qui manque à un peuple si nombreux, pour sa subsistance. Alors naîtront aussi peu à peu les vices inséparables de ces établissements, et qui, corrompant par degré la nation par ses goûts et dans ses principes, altéreront et détruiront enfin le gouvernement. Ce mal est inévitable.
 
Il faut que toutes les choses humaines finissent : il est beau qu’après une longue et vigoureuse existence un État finisse par l’excès de la population
 

De cette dépendance mutuelle qu’on croit être le lien de la société, naissent tous les vices qui la détruisent.

 

Le peuple anglais n’aime pas la liberté pour elle-même ; il l’aime parce qu’elle produit de l’argent.