Aller au contenu

Page:Rousseau - Œuvres et correspondance inédites éd. Streckeisen-Moultou.djvu/242

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

216 AVANT-PROPOS DE L^ÉDITEUR.

vernement qiii, par sa nature, se tient toujours le plus près de la loi ? De là, qu est-ce que la loi ? et une chaîne de questions de cette importance. Je voyois que tout cela me menoit à de grandes vérités, utiles au bonheur du genre humain, mais surtout à celui* de ma patrie, où je n’avois pas trouvé, dans le voyage que je venois d’y l’aire, les notions des lois et de la liheité assez justes ni assez nettes, à mon gré ; et j*avois cru cette manière indirecte de les leur donner la plus propre à ménager Famour-propre de ses membres, et à nie faire pardonner d’avoû* pu voir là-dessus un peu plus loin qu’eux.

(( Quoiqu’il y eût cinq ou six ans que je travaillois à cet ouvrage, il n’était encore guère avancé. Les livres de cette espèce demandent de la méditation, du loisir, de la tranquillité. De plus, je faisois celui-là, comme on dit, en bomie fortune, et je n’avois voulu com- muniquer mon projet à personne, pas même à Diderot. Je craignois qu’il ne parût trop hardi pour le siècle et le pays où j’écrivois, et que l’efiroi de mes amis ne me gênât dans l’exécution,

« J’ignorois encore s’il seroit faît à temps, et de manière à pouvoir paroUre de mon vivant. Je voulois pouvoir, sans contrainte, donner à mon sujet tout ce qu’il me demandoit ; bien sûr que, n’ayant point l’humeur satirique, et ne voulant jamais chercher d’application, je serois toujours in’épréhensible en toute équité. Je voulois user plei- nement, sans doute, du droit de penser, que j’avois par ma connois- sance ; mais toujours en respectant le gouvernement sous lequel j’avois à vivre, sans jamais désobéir à ses lois ; et très-attentif à ne pas violer le droit des gens, je ne voulois pas non plus renoncer par crainte à ses avantages. »

Dans le second passage, au livre X, Rousseau, après avoir passé en revue le produit pécuniaire de ses différentes publications, con- tinue en ces termes :

« J’avois encore deux ddvrages sur le chantier. Le premier étoit mes InstittUions politiques ; j’examinai l’état de ce fore, et je trouvai qu’il demandoit encore plusieurs années de travail. Je n’eus pas le courage de le poursuivre et d’attendre qu’il fût achevé poiu* exécuter ma résolution. Ainsi, renonçant à cet ouvrage, je résolus d’en tirer ce qui pouvoit se détacher, puis de brûler tout le reste ; et