Page:Rousseau - Œuvres et correspondance inédites éd. Streckeisen-Moultou.djvu/61

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trembler : n’y joignons pas du moins l’étourderie. J ai l’esprit très-lent, l’âge et les maux le ralentissent encore. Un gouvernement provisionnel a ses inconvénients : quelque attention qu’on ait à ne faire que les changements nécessaires, un établissement tel que celui que nous cherchons ne se fait point sans un peu de commotion, et l’on doit tâcher au moins de n’en avoir qu’une. On pourrait d’abord jeter les fondements, puis élever plus à loisir l’édifice. Mais cela suppose un plan déjà fait, et c’est pour tracer ce plan même qu’il faut le plus méditer. D’ailleurs il est à craindre qu’un établissement imparfait ne fasse plus sentir ses embarras que ses avantages, et que cela ne dégoûte le peuple de l’achever.

Voyons toutefois ce qui se peut faire.

Les mémoires dont j’ai besoin reçus, il me faut bien six mois pour m’instruire, et autant au moins pour digérer mes instructions, de sorte que du printemps prochain en un an je pourrais proposer mes idées sur une forme provisionnelle, et au bout de trois autres années mon plan complet d’institution. Comme on ne doit promettre que ce qui dépend de soi, je ne suis pas sûr de mettre en état mon travail en si peu de temps, mais je suis si sûr de ne pouvoir l’abréger, que, s’il faut, rapprocher un de ces deux termes, il vaut mieux que je n’entreprenne rien.

Je suis charmé du voyage que vous faites en Corse ; dans ces circonstances, il ne peut que vous être très-utile. Si, comme je n’en doute pas, vous vous y occupez de notre objet, vous verrez mieux ce qu’il faut me dire, que je ne puis voir ce que je dois vous demander. Mais permettez-moi une curiosité que m’inspirent l’estime et l’admiration. Je voudrais savoir tout ce qui regarde M. Paoli ; quel âge