Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/412

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mes que les leurs. Ainsi l’ordre veut qu’avant d’attaque les Catholiques, je commence par attaquer les Protestans, a par leur montrer qu’ils ne savent pas leur propre religion. Est-ce là, Monsieur, ce que vous m’ordonnez de faire ? Cette entreprise préliminaire rejetteroit l’autre encore loin, & il me paroît que la grandeur de la tâche ne vous effraye gueres, quand il n’est question que de l’imposer.

Que si les argumens ad hominem qu’on m’objecteroit vous paroissent peu embarrassans, ils me le paroissent beaucoup, à moi, & dans ce cas, c’est à celui qui fait les résoudre, d’en prendre le soin.

Il y a encore, ce me semble, quelque chose de dur & d’injuste de compter pour rien tout ce que j’ai fait, & de regarder ce qu’on me prescrit comme un nouveau travail à faire. Quand on a bien établi une vérité par cent preuves invincibles, ce n’est pas un si grand crime à mon avis, de ne pas courir après la cent & unieme ; sur-tout si elle n’existe pas ; j’aime à dire des choses utiles, mais je n’aime pas à les répéter ; & ceux qui veulent absolument des redites, n’ont qu’à prendre plusieurs exemplaires du même écrit. Les Protestans de France jouissent maintenant d’un repos auquel je puis avoir contribué, non par de vaines déclamations comme tant d’autres, mais par de fortes raisons politiques bien exposées. Cependant voilà qu’ils me pressent d’écrire en leur faveur ; c’est faire trop de cas de ce que je puis faire, ou trop peu de ce que j’ai fait. Ils avouent qu’ils sont tranquilles ; mais ils veulent être mieux que bien, & c’est après que je les ai servis de toutes mes forces, qu’ils me reprochent de ne les pas servir au-delà de mes forces.