Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/444

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fort à une machine ambulante à laquelle il est interdit de penser. Ne pouvant laisser ma tête vide, je la veux empailler ; c’est de soin qu’il faut l’avoir pleine, pour être libre & vrai, sans crainte d’être décrété. J’ai l’avantage de ne connoître encore que dix plantes, en comptant l’hysope ; j’aurai long-tems du plaisir à prendre, avant d’en être aux arbres de nos forêts.

J’attends avec impatience votre nouvelle édition des Considérations sur les mœurs. Puisque vous avez des facilités pour tout le Royaume, adressez le paquet à Pontarlier, à moi directement, ce qui suffit, ou à M. Junet, Directeur des postes ; il me le sera parvenir. Vous pouvez aussi le remettre à Duchesne, qui me le sera passer avec d’autres envois. Je vous demanderai même sans façon de faire relier l’exemplaire, ce que je ne puis faire ici sans le gâter ; je le prendrai secrétement dans ma poche en allant herboriser, & quand je ne verrai point d’Archers autour de moi, j’y jetterai les yeux à la dérobée. Mon cher ami, comment faites-vous pour penser être honnête homme, & ne vous pas faire pendre ? Cela me paroît difficile, en vérité. Je vous embrasse de tout mon cœur.