quand on commence par en manquer. J’apportois au sein de votre nation deux grands droits qu’elle eût dû respecter davantage ; le droit sacré de l’hospitalité, & celui des égards que l’on doit aux malheureux ; j’y apportois l’estime universelle & le respect même de mes ennemis. Pourquoi m’a-t-on dépouillé chez vous de tout cela ? Qu’ai-je fait pour mériter un traitement si cruel ? En quoi me suis-je mal conduit à Londres, où l’on me traitoit si favorablement avant que j’y fusse arrivé ? Quoi, Mylord ! des diffamations secretes qui ne devroient produire qu’une juste horreur pour les fourbes qui les répandent, suffiroient pour détruire l’effet de cinquante ans d’honneur & de mœurs honnêtes ! Non, les pays où je suis connu ne me jugeront point d’après votre public mal instruit ; l’Europe entiere continuera de me rendre la justice qu’on me refuse en Angleterre, & l’éclatant accueil que, malgré le décret, je viens de recevoir à Paris à mon passage, prouve que par-tout où ma conduite est connue, elle m’attire l’honneur qui m’est dû. Cependant si le public françois eût été aussi prompt à mal juger que le vôtre, il en eût eu le même sujet. L’année derniere on fit courir à Geneve un libelle*
[*Sentiment des Citoyens.] affreux sur ma conduite à Paris. Pour toute réponse, je fis imprimer ce libelle à Paris même. Il y fut reçu comme il méritoit de l’être, & il semble que tout ce que les deux sexes ont d’illustre & de vertueux dans cette capitale, ait voulu me venger par les plus grandes marques d’estime, des outrages de mes vils ennemis.
Vous direz, Mylord, qu’on me connoît à Paris & qu’on ne me connoît pas à Londres ; voilà précisément de quoi je me