Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/585

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Un même cœur pourroit-il suffire à deux comme celle-là. Il a marché jusqu’ici dans les ténebres, il s’est caché, mais maintenant il se montre à découvert. Il a rempli l’Angleterre, la France, les gazettes, l’Europe entiere de cris auxquels je ne sais que répondre, & d’injures dont je me croirois digne, si je daignois les repousser. Tout cela ne décele-t-il pas avec évidence le but qu’il a caché jusqu’à présent avec tant de soin ? Mais laissons M. Hume ; je veux l’oublier malgré les maux qu’il m’a faits. Seulement qu’il ne m’ôte pas mon pere. Cette perte est la seule que je ne pourrois supporter. Avez-vous reçu mes deux dernieres lettres, l’une du 20 Juillet 9 & l’autre du 9 Août ? Ont-elles eu le bonheur d’échapper aux filets qui sont si tendus tout autour de moi, & au travers desquels peu de chose passe ? Il paroît que l’intention de mon persécuteur & de ses amis, est de m’ôter route communication avec le continent, & de me faire périr ici de douleur & de misere. Leurs mesures sont trop bien prises pour que je puisse aisément leur échapper. Je suis préparé à tout, & je puis tout supporter hors votre silence. Je m’adresse à M. Rougemont ; je ne connois que lui seul à Londres à qui j’ose me confier. S’il me refuse ses services, je suis sans ressource, & sans moyen pour écrire & mes amis. Ah ! Mylord, qu’il me vienne une lettre de vous, & je me console de tout le reste.