Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t13.djvu/16

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de cette liberté originelle pour laquelle ils sembloient être nés ; & leur sont aimer leur esclavage. Je croirois déshonorer les Princes,les Peuples & mon jugement. Je dois donc me consoler dumalheur que j’ai de ne pas penser comme M. Rousseau.

Je remarque cependant qu’il se rapproche peu à peu du sentimentdes gens de Lettres. Il y a lieu d’espérer que s’il compose encorecinq ou six brochures pour prouver qu’on ne l’attaque point, &qu’il continue de répondre en disant qu’il ne répond pas, il seraparfaitement d’accord avec eux. Cela est d’autant plusvraisemblable, qu’il emploie tour l’art possible pour contenter laplupart de ses Lecteurs. Quel que soit votre sentiment, voustrouverez qu’il l’adopté. Si vous dites que c’est participer enquelque sorte à la suprême intelligence que d’acquérir desconnoissances & d’étendre ses lumieres, vous pensez comme M.Rousseau. Prétendez-vous qu’acquérir des connoissances, c’estperdre son tems ? Monsieur Rousseau pense tout comme vous. Selonlui, la science est un remede excellent pour les maladies de l’ame ;& selon lui, c’est un poison qui corrompt les mœurs. Il convientdes divers genres d’utilité que l’homme peut retirer des Arts &des Sciences, & il assure aussi qu’ils sont vains dans l’objet qu’ils seproposent. Si un homme modéré dit qu’il eût été à desirer qu’on se fut livré aux Sciences avec moins d’ardeur, & qu’il ne faut pas lesapprendre indistinctement à tour le monde. M. Rousseau est deson sentiment. Si vous croyez qu’il ne faut permettre en Europequ’à trois ou quatre génies du premier ordre, de se livrer àl’étude, vous êtes de l’avis