Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t13.djvu/67

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Le plus savant des Athéniens avoir raison de dire que la présomption des hommes d’Etat, des Poetes & des Artistes d’Athenes, ternissoit leur savoir à ses yeux, & qu’ils avoient tort de se croire les plus sages des hommes ; mais en blâmant leur orgueil & en décréditant les Sophistes, il ne faisoit point l’éloge de l’ignorance, qu’il regardoit comme le plus grand mal. Il aimoit à tirer des sons harmonieux de la lyre, avec la main dont il avoir fait les statues des Graves. La Rhétorique, la Physique, l’Astronomie furent l’objet de ses études ; & selon Diogene Laerce, il travailla aux tragédies d’Euripide. Il est vrai qu’il s’appliqua principalement à faire une science de la morale, & qu’il ne s’imaginoit pas savoir ce qu’il ne savoit pas : est-ce là favoriser l’ignorance ? Doit-elle se prévaloir du déchaînement de l’ancien Caton contre ces discoureurs artificieux, contre ces Grecs qui apprenoient aux Romains l’art funeste de rendre toutes les vérités douteuses. Un des chefs de la troisieme Académie, Carnéade, montrant en présence de Caton la nécessité d’une loi naturelle, & renversant le lendemain ce qu’il avoit établi le jour précédent, devoit naturellement prévenir l’esprit de ce censeur contre la littérature des Grecs. Cette prévention, à la vérité, s’étendit trop loin ; il en sentit l’injustice, & la répara en apprenant la langue Grecque, quoiqu’avancé en âge ; il forma son style sur celui de Thucydide & de Démosthene, & enrichit ses ouvrages des maximes & des maximes & des faits qu’il en tira. L’agriculture, la médecine, l’histoire & beaucoup d’autres matieres exercerent sa plume. Ces traits sont voir que, si Socrate & Caton eussent fait l’éloge de l’ignorance, ils se seraient censurés eux-mêmes ; & M. Rousseau,