Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/18

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Je suppose toujours, Monsieur, que vous n’auriez garde de confier l’éducation de Mrs. vos enfans à un homme que vous ne croiriez pas digne de votre estime, & ne pensez point, je vous prie, que par le parti que j’ai pris de m’attacher sans réserve à votre maison dans une occasion délicate, j’aye prétendu vous engager vous-même en aucune maniere ; il y a bien de la différence entre nous : en faisant mon devoir autant que vous m’en laisserez la liberté, je ne suis responsable de rien, & dans le fond, comme vous êtes, Monsieur, le maître & le supérieur naturel de vos enfans, je ne suis pas en droit de vouloir à l’égard de leur éducation, forcer votre goût de se rapporter au mien ; ainsi, après vous avoir fait les représentations qui m’ont paru nécessaires, s’il arrivoit que vous n’en jugeassiez pas de même, ma conscience serait quitte à cet égard, & il ne me resteroit qu’à me conformer à votre volonté. Mais pour vous, Monsieur, nulle considération humaine ne peut balancer ce que vous devez aux mœurs & à l’éducation de Mrs. vos enfans, & je ne trouverois nullement mauvais qu’après m’avoir découvert des défauts, que vous n’auriez peut-être pas d’abord apperçus, & qui seroient d’une certaine conséquence pour mes éleves, vous vous pourvussiez ailleurs d’un meilleur sujet.

J’ai donc lieu de penser que tant que vous me souffrez dans votre maison, vous n’avez pas trouvé en moi de quoi effacer l’estime dont vous m’aviez honoré. Il est vrai, Monsieur, que je pourrois me plaindre que dans les occasions où j’ai pu commettre quelque faute, vous ne m’ayez pas sait l’honneur de m’en avertir tout uniment, c’est une grace que je