Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/334

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à lui en dire mon sentiment. Sa conduite le dispensoitfort de s’étendre en paroles ; cependant, puisqu’il envouloit dire, j’aurois voulu qu’à toutes ces louanges fades il eût substitué quelquefois la voix d’un ami ; mais je n’ai jamais trouvé dans son langage rien qui sentit la vraie amitié, pas même dans la façon dont il parloit de moi à d’autres en ma présence. On eût dit qu’en voulant me faire des patrons il cherchoit à m’ôter leur bienveillance, qu’il vouloit plutôt que j’en fusse assisté qu’aimé ; & j’ai quelquefois été surpris du tour révoltant qu’il donnoit à ma conduite près des gens qui pouvoient s’en offenser. Un exemple éclaircira ceci. M. Penneck du Musaeum, ami de Mylord Maréchal & pasteur d’une paroisse où l’on vouloit m’établir, vint nous voir. M. Hume, moi présent, lui fait mes excuses de ne l’avoir pas prévenu ; le docteur Maty, lui dit - il, nous avoit invités pour jeudi au Musaeum où M. Rousseau devoit vous voir ; mais il préféra d’aller avec Madame Garrick à la comédie ; on ne peut pas faire tant de choses en un jour.*

[* Je ne me rappelle pas un mot de toute cette histoire ; mais ce qui me dispense d’y ajouter foi, c’est que je me souviens très-bien que nous avions pris deux jours différens pour visiter le Musaeum & pour aller à la comédie.] Vous m’avouerez, Monsieur, que c’étoit-là une étrange façon de me capter la bienveillance de M. Penneck."

"Je ne sais ce qu’avoit pu dire en secret M. Hume à ses