Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/433

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AU FAIT, AVOCAT.

M’y voici.

Les Editeurs de la piece qui a donné lieu à celle-ci, pour vous faire voir, Messieurs, qu’ils ont étudié en rhétorique, débutent en exposant à vos yeux un tableau bien séduisant : c’est l’éloge pompeux des talens & des belles qualités de M. Hume. Ils peignent aussi avantageusement qu’il leur est possible, le héros de leur comédie scandaleuse. Ils jettent avec beaucoup d’adresse de la poudre aux yeux des spectateurs, pour, séduire, autant qu’il est possible, le préjugé, & le faire pencher du côté de celui qu’ils se flattent de pouvoir innocenter. De-là ils passent subitement au portrait de son adverse partie ; mais ce ne sont plus les mêmes couleurs qu’ils emploient, ils abandonnent le carmin & l’outremer, pour ne tremper leurs pinceaux que dans le noir & l’obscur. Sur la droite, tout est brillant & flatteur ; sur la gauche, tout est hideux & révoltant. D’un côté sont les roses, de l’autre les épines. Voilà le fin du métier. C’est un piégé où il n’y a que les petits génies qui, s’y laissent prendre ; mais les gens éclairés savent adroitement l’éviter. Ils s’approchent & fixent attentivement les objets, confrontent les copies avec les originaux, & si les peintres, soit par passion ou par enthousiasme, sont tombés dans les extrêmes qu’ils aient flatté ce qui ne devoit pas l’être, & trop ridiculisé ce qui ne le méritoit pas, on les siffle & l’on ne les regarde plus que comme des barbouilleurs.

Fixer, je vous prie, Messieurs., ce premier chef- d’œuvre. Ce doit être le portrait en grand d Philosophe Anglois. Des