Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/486

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avoit rien de plus important que de s’opposer à son bien-être. Mais hélas ! la mémoire s’enfuit avec l’âge. Dans une lettre à Mylord Maréchal, le Genevois expatrié consent à être pensionné, toutefois aux conditions que cela ne sera point de bruit, puisqu’il témoigne que le secret de cette affaire, comme si le salut de l’Etat en dépendoit, sera pour lui une circonstance très-agréable. À peine lui a-t-on promis ce secret tant desiré, que ce Philosophe postiche change tout-à-coup de batterie ; il écrit au général Conway qu’il veut employer l’orgueil qu’on lui impute, à se glorifier du bonheur d’être pensionné d’un grand Roi, & que ce qu’il y voit de plus pénible est de ne pouvoir s’en honorer aux yeux du public comme aux siens ; mais que lorsqu’il recevra les bienfaits, il veut ajoute-t-il, pouvoir se livrer tout-entier aux sentimens que ces mêmes bienfaits lui inspireront. Le reste de l’épître n’est que du compliment, où l’Auteur prie qu’on lui réserve la bonne volonté où l’on est de lui faire du bien, pour des tans plus heureux. Est-il possible de tomber avec du bon sens dans un pareil égarement ! N’est-ce pas dans le fort des douleurs qu’il est le plus naturel de desirer d’en être soulagé ? Et Rousseau, dans l’accès de la maladie qui l’afflige, refuse follement le vrai remede qui pourroit en opérer la guérison.

M. Hume prétend que la lettre de Rousseau au Ministre, leur parut un refus absolu d’accepter la pension. J’oserois soupçonner que M. Hume ne fut pas le dernier à interpréter ainsi l’idée du Genevois. Je crois que ces Messieurs ne se connoissoient pas encore bien en énigmes, je vais les éclairer : il y a à parier que J. J. avoir bien plus d’envie d’accepter que de