Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t15.djvu/157

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une seconde ou troisieme édition. L’Auteur tenoit un peu à cet article Anglois-Romain. Les vrais Magistrats, & l’Auteur même, sans que je m’en mêlasse, le firent ôter. J’étois journaliste alors : j’eus le plaisir de pouvoir donner un ou deux grands Extraits d’un ouvrage sain & non suspect, d’un tel ami.

Arriva les troisieme ouvrage de l’Auteur, le grand ouvrage de l’Esprit des loix. Pour celui-là, je ne me vanterai pas de l’avoir corrigé, si ce n’est fort après coup. Je ne m’en doutois pas, quoiqu’il m’en eût parlé vaguement depuis long-tems. J’avois peut-être la fausse sécurité de croire qu’il ne le donneroit pas sans mon attache. Il fut long-tems public sans que je voulusse croire qu’il fût de lui. Lorsque je n’en pus plus douter, je lui écrivis pour me plaindre de sa réserve, inouie avec moi. Je dois être cru. Notre commerce étoit d’une franchise encore plus inouie entre savans. Je puis montrer les lettres par lesquelles il m’avoue qu’il s’est à dessein caché de moi dans cet ouvragre, craignant que je ne m’y formalise de bien des choses, le croyant peu de ma compétence, & y parlant du reste assez peu de religion & de mœurs, croyoit-il, vouloit-il croire ?

Piqué de sa réserve, je lui écrivis qu’il auroit dû au moins me donner cet ouvrage imprimé, comme j’étois en possession de recevoir de lui toutes ses éditions de la grandeur des Romains, lui disant que je voulois lire son livre, mais que je ne le lirois que de sa main & dans celui qu’il m’auroit lui-même donné ; à quoi il repliqua qu’il ne me le donneroit pas, & qu’il me prioit très-instamment de ne pas lire son livre, qui n’étoit point, disoit-il toujours, de ma compétence.

Je m’entêtai de le lire & de l’avoir de sa main. Je savois bien