Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/189

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

& vrai, dire d’autrui le bien tant qu’il me sera possible, ne dire jamais que le mal qui me regarde, & qu’autant que j’y suis forcé. Qui est-ce qui, dans l’état où l’on m’a mis, a droit d’exiger de moi davantage ? Mes confessions ne sont point faites pour paroître de mon vivant ni de celui des personnes qui y sont péniblement intéressées. Si j’étois le maître de ma destinée & de celle de cet écrit, il ne verroit le jour qu’après ma mort & la leur. Mais les efforts que la terreur de la vérité fait faire à mes puissans oppresseurs pour en effacer les traces, me forcent à faire pour les conserver tout ce que me permettent le droit le plus exact & la plus sévère justice. Si ma mémoire devoit s’éteindre avec moi, plutôt que de compromettre personne, je souffrirois un opprobre injuste & passager sans murmure : mais puisqu’enfin mon nom doit vivre, je dois tâcher de transmettre avec lui le souvenir de l’homme infortuné qui le porta, tel qu’il fut réellement, & non tel que d’injustes ennemis travaillent sans relâche à le peindre.


Fin du huitième Livre.