Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/20

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mener à grand’chose. De toutes les personnes à qui je fus recommandé, trois seules me furent utiles. M. Damesin, gentilhomme Savoyard, alors écuyer & je crois, favori de Mde. la princesse de Carignan ; M. de B[...], secrétaire de l’académie des inscriptions & garde des médailles du Cabinet du Roi ; & le P. Castel, Jésuite, auteur du clavecin oculaire.

Toutes ces recommandations, excepté celle de M. Damesin, me venoient de l’abbé de Mably.

M. Damesin pourvut au plus pressé par deux connaissances qu’il me procura : l’une, de M. de Gasc, président à mortier au parlement de Bordeaux & qui jouoit très bien du violon ; l’autre, de M. l’abbé de Léon, qui logeoit alors en Sorbonne, jeune seigneur très aimable, qui mourut à la fleur de son âge, après avoir brillé quelques instans dans le monde sous le nom de chevalier de Rohan. L’un & l’autre eurent la fantaisie d’apprendre la composition. Je leur en donnai quelques mais de leçons, qui soutinrent un peu ma bourse tarissante. L’abbé de Léon me prit en amitié & vouloit m’avoir pour son secrétaire ; mais il n’étoit pas riche & ne put m’offrir en tout que huit cens francs, que je refusai bien à regret & mais qui ne pouvoient suffire pour mon logement, ma nourriture & mon entretien.

M. de B[...]me reçut fort bien. Il aimoit le savoir, il en avoit ; mais il étoit un peu pédant. Mde. de B[...]auroit été sa fille ; elle étoit brillante & petite-maîtresse. J’y dînois quelquefois. On ne sauroit avoir l’air plus gauche & plus sot que je l’avois vis-à-vis d’elle. Son maintien dégagé