Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/340

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que parce qu’ils jouoient aux échecs, & pour obtenir une pauvre petite partie, j’endurois quatre heures d’ennui. Comme ils se fourroient partout & vouloient se mêler de tout, Thérèse les appeloit les commères, & ce nom leur est demeuré à Montmorenci.

Telles étoient, avec mon hôte M. Mathas, qui étoit un bon homme, mes principales connaissances de campagne. Il m’en restoit assez à Paris pour y vivre, quand je voudrais, avec agrément, hors de la sphère des gens de lettres, où je ne comptois que le seul Duclos pour ami : car Deleyre étoit encore trop jeune ; & quoique, après avoir vu de près les manœuvres de la clique philosophique à mon égard, il s’en fût tout à fait détaché, ou du moins je le crus ainsi, je ne pouvois encore oublier la facilité qu’il avoit eue à se faire auprès de moi le porte-voix de tous ces gens-là.

J’avois d’abord mon ancien & respectable ami M. Roguin. C’étoit un ami du bon temps, que je ne devois point à mes écrits, mais à moi-même, & que pour cette raison j’ai toujours conservé. J’avois le bon Lenieps, mon compatriote, & sa fille alors vivante, Mde. Lambert. J’avois un jeune Genevois, appelé C[...]t, bon garçon, ce me sembloit, soigneux, officieux, zélé ; mais ignorant, confiant, gourmand, avantageux, qui m’étoit venu voir dès le commencement de ma demeure à l’Hermitage, & sans autre introducteur que lui-même, s’étoit bientôt établi chez moi, malgré moi. Il avoit quelque goût pour le dessin, & connoissoit les artistes. Il me fut utile pour les estampes de la Julie ; il se chargea de la direction des dessins & des planches, & s’acquitta bien de cette commission.