Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/40

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je les allai passer chez lui & je me trouvai mieux, je l’avoue, du gîte de sa maison que de celui du lazaret. Il me fit force caresses. Dupont, son secrétaire, étoit un bon garçon, qui me mena, tant à Gênes qu’à la campagne, dans plusieurs maisons où l’on s’amusoit assez ; & je liai avec lui connoissance & correspondance, que nous entretînmes fort longtemps. Je poursuivis agréablement ma route à travers la Lombardie. Je vis Milan, Vérone, Bresse, Padoue & j’arrivai enfin à Venise, impatiemment attendu par M. l’ambassadeur.

Je trouvai des tas de dépêches, tant de la Cour que des autres ambassadeurs, dont il n’avoit pu lire ce qui étoit chiffré, quoiqu’il eût tous les chiffres nécessaires pour cela. N’ayant jamais travaillé dans aucun bureau ni vu de ma vie un chiffre de ministre, je craignis d’abord d’être embarrassé ; mais je trouvai que rien n’étoit plus simple & en moins de huit jours j’eus déchiffré le tout, qui assurément n’en valoit pas la peine ; car, outre que l’ambassade de Venise est toujours assez oisive, ce n’étoit pas à un pareil homme qu’on eût voulu confier la moindre négociation. Il s’étoit trouvé dans un grand embarras jusqu’à mon arrivée, ne sachant ni dicter, ni écrire lisiblement. Je lui étois très utile ; il le sentoit & me traita bien. Un autre motif l’y portoit encore. Depuis M. de F

[roula] y son prédécesseur, dont la tête s’étoit dérangée, le consul de France, appelé M. Le Blond, étoit reste chargé des affaires de l’ambassade ; & depuis l’arrivée de M. de M

[ontaigu] il continuoit de les faire jusqu’à ce qu’il l’eût mis au foit. M. de M

[ontaigu] jaloux qu’un autre fit son métier, quoique lui-même en fût incapable,