gentilshommes François, me donna pour eux une sorte d’attachement que leur commerce ne pouvoit qu’affermir. Cette connoissance même ne finit pas là, puisqu’elle dure encore, & qu’ils me sont revenus voir diverses fois, non plus à pied cependant, cela étoit bon pour le début ; mais plus j’ai vu ces Messieurs, moins j’ai trouvé de rapports entre leurs goûts & les miens, moins j’ai senti que leurs maximes fussent les miennes, que mes écrits leur fussent familiers, qu’il y eût aucune véritable sympathie entre eux & moi. Que me vouloient-ils donc ? Pourquoi me venir voir dans cet équipage ? Pourquoi rester plusieurs jours ? Pourquoi revenir plusieurs fois ? Pourquoi désirer si fort de m’avoir pour hôte ? Je ne m’avisai pas alors de me faire ces questions. Je me les suis faites quelquefois depuis ce temps-là.
Touché de leurs avances, mon cœur se livroit sans raisonner, sur-tout à M. Dastier, dont l’air plus ouvert me plaisoit davantage. Je demeurai même en correspondance avec lui, & quand je voulus faire imprimer les Lettres de la montagne, je songeai à m’adresser à lui pour donner le change à ceux qui attendoient mon paquet sur la route de Hollande. Il m’avoit parlé beaucoup, & peut-être à dessein, de la liberté de la presse à Avignon ; il m’avoit offert ses soins si j’avois quelque chose à y faire imprimer ; je me prévalus de cette offre, & je lui adressai successivement par la poste mes premiers cahiers. Après les avoir gardés assez long-temps, il me les renvoya, en me marquant qu’aucun libraire n’avoit osé s’en charger, & je fus contraint de