Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t2.djvu/39

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N. Un moment : reprenez haleine. J’aime les vues utiles ; & je vous ai si bien suivi dans celle-ci que je crois pouvoir perorer pour vous.

Il est clair, selon votre raisonnement, que pour donner aux ouvrages d’imagination la seule utilité qu’ils puissent avoir, il faudroit les diriger vers un but oppose à celui que leurs Auteurs se proposent ; éloigner toutes les choses d’institution ; ramener tout à la Nature ; donner aux hommes l’amour d’une vie égale & simple ; les guerir des fantaisies de l’opinion ; leur rendre le goût des vrais plaisirs, leur faire aimer la solitude & la paix ; les tenir à quelques distances les uns des autres ; & au lieu de les exciter à s’entasser les Villes, les porter à s’étendre également sur le territoire pour le vivifier de toutes parts. Je comprends encore qu’il ne s’agit pas de faire des Daphnis, des Sylvandres, des Pasteurs d’Arcadie, des Bergers du Lignon, d’illustres Paysans cultivant leurs champs de leurs propres mains, & philosophant sur la Nature, ni d’autres pareils êtres romanesques qui ne peuvent exister que dans les Livres ; mais de montrer aux gens aisés que la vie rustique & l’agriculture ont