Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t5.djvu/81

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L’examen qui me reste à faire est bien différent ; je n’y vois qu’embarras, mystère, obscurité ; je n’y porte qu’incertitude & défiance. Je ne me déterminé qu’en tremblant & je vous dis plutôt mes doutes que mon avis. Si vos sentiments étoient plus stables, j’hésiterois de vous exposer les miens ; mais, dans l’état où vous êtes, vous gagnerez à penser comme moi [1]. Au reste, ne donnez a mes discours que l’autorité de la raison ; j’ignore si je suis dans l’erreur. Il est difficile, quand on discute, de ne pas prendre quelquefois le ton affirmatif ; mais souvenez-vous qu’ici toutes mes affirmations ne sont que des raisons de douter. Cherchez la vérité vous-même : pour moi, je ne vous promets que de la bonne foi.

Vous ne voyez dans mon expose que la religion naturelle, bien étrange qu’il en faille une autre. Par où connaîtrai-je cette nécessité ? De quoi puis-je être coupable en servant Dieu selon les lumières qu’il donne à mon esprit & selon les sentiments qu’il inspire à mon cœur ? Quelle pureté de morale, quel dogme utile à l’homme & honorable à son auteur puis-je tirer d’une doctrine positive, que je ne puisse tirer sans elle du bon usage de mes facultés ? Montrez-moi ce qu’on peut ajouter, pour la gloire de Dieu, pour le bien de la société, & pour mon propre avantage, aux devoirs de la loi naturelle, & quelle vertu vous ferez naître d’un nouveau culte, qui ne soit pas une conséquence du mien. Les

  1. Voilà, je crois, ce que le bon vicaire pourroit dire à présent au public.